Approche psychanalytique de la relation entraîneur-entraîné :

le sport comme prétexte de la rencontre

Sophie Huguet Françoise Labridy  

 

Introduction

 

La relation « entraîneur-entraîné » est un thème récurrent de la recherche en psychologie sportive. La relation intéresse les chercheurs mais aussi les médias qui surgissent souvent dans leur intimité. Les sportifs, eux-mêmes, peinent à trouver les mots justes pour qualifier les liens affectifs qui les unissent à leur entraîneur. Dans de nombreux cas, la relation est bien plus qu’une simple histoire de résultats et dépasse totalement le cadre sportif.

Alors que l’entraîneur est souvent perçu comme un technicien, un calculateur de performance, il soutient également une position paradoxale, souvent délicate à assumer ; faite d’incertitudes, de non-maîtrise de la réussite et des contingences de la compétition (blessures, échecs).

Dans ce contexte, l’approche psychanalytique orientée par l’apport de Freud et l’enseignement de Lacan présente un éclairage différent sur les processus à l’œuvre dans la relation, l’abordant par le registre du transfert. L’entraîneur par la place importante (en temps, en conseil, en savoir-pouvoir, en présence) qu’il prend pour l’athlète favorise la remémoration des relations affectives antérieures les plus cruciales.

Sa fonction le conduit presque nécessairement à raviver implicitement ou explicitement pour l’athlète un rôle pris par les parents ou un modèle idéal adulte (voire idéalisé), de frère, de confident auprès du sportif. La prise en compte de l’inconscient permet de décrire la collusion affective, qui se crée entre un athlète et son entraîneur : au-delà du savoir technique même, l’entraîneur est un appui relationnel nécessaire dans la performance de haut niveau.

C’est donc à partir du transfert, concept élaboré dans la théorie analytique, que cette étude questionne l’importance des relations aux parents, comme support construisant la particularité d’une relation entre un entraîneur et son athlète.

 

Une approche psychanalytique de la relation entraîneur-entraîné

 

 

Le corps : Un intermédiaire dans la performance

Les pratiques sportives de haut niveau sont devenues des pratiques d’exercices du corps poussé à outrance : le corps, lieu de « savoir-faire » pour le sportif, n’est pas exclusivement attaché à une notion de plaisir, il permet d’atteindre ce que Freud a nommé un « au-delà du principe de plaisir », une satisfaction extrême qui confine à la douleur, également nommée « jouissance » par Lacan ; c’est à dire un éprouvé dépassant le seuil de l’homéostasie.

Le corps vivant défini comme le lieu de la satisfaction pulsionnelle est un point de rencontre entre la psychanalyse et le sport. Le sujet recherche par l’intermédiaire de l’acte sportif, une satisfaction dans le dépassement des limites de l’organisme, qui lui permet d’éprouver des émotions paroxystiques : « vertiges, sorties de soi » (Labridy, 1997).

De ce rapport au corps dépend la performance qu’il désire atteindre et ses exigences vis- à-vis de la relation avec son entraîneur. En effet, l’entraîneur emmène le sportif vers un idéal de performance dont ils ignorent tous les deux les éprouvés corporels : ce passage à une performance nouvelle est idéalisé, ce qui est oublié c’est que le corps va franchir une limite de jouissance ; le corps va se porter « hors-limite », hors du déjà éprouvé, ce qu’évoque Brousse (1993) : « Il s’attache à ne pas être dans son corps, à en dépasser sans cesse les limites pour se retrouver dans un ailleurs innommable ».

La particularité de la relation réside d’abord dans le fait qu’elle doit passer par l’intermédiaire d’un corps, qui appartient au sportif et qui va être en même temps dirigé par l’entraîneur.

Une relation singulière s’installe entre deux êtres qui désirent atteindre un idéal de performance et où l’un pourra connaître « la jouissance » dans sa chair, alors que l’autre aura à la vivre par procuration. L’entraîneur prolonge à travers la réalisation de son entraîné, la recherche d’une satisfaction que son propre arrêt de la compétition l’a empêché de réaliser pour lui-même.

La prise en compte du transfert

Ce franchissement des limites corporelles nécessite donc que les désirs de l’entraîneur et de l’entraîné soient orientés vers les mêmes objectifs. La perspective psychanalytique désigne les mécanismes inconscients qui sont mis en jeu dans la relation : Labridy (1989) y voit « un seul acte, mais deux désirs d’être premier qui se rencontrent ».

La performance est soutenue par la présence d’un transfert qui opère entre eux. Le transfert, comme l’a déclaré Freud, est inhérent à toutes les relations humaines ; il l’a théorisé dans ses conséquences, à partir du dispositif de la cure analytique. Pour Freud, le transfert constitue un support dans la cure : s’il est positif, le médecin est revêtu « d’une grande autorité, transforme les communications et conceptions de ce dernier en articles de foi », alors que sans ce transfert le malade ne ferait pas attention aux dires du médecin.

Freud (1881) a identifié « un trop plein d’excitation affectueuse, souvent mêlé d’hostilité, qui n’ont leur source ou leur raison d’être dans aucune expérience réelle (…) Elles dérivent d’anciens désirs devenus inconscients » pour définir les mécanismes du transfert.

Ainsi, les éprouvés antérieurs sont réactivés dans une relation actuelle. Les substituts sont souvent des représentations familiales (images du père, mère). Dans le sport, « Un athlète pourra ainsi répéter une suite d’échecs dans une relation actuelle à un entraîneur, alors que ces échecs s’adressent en fait à un père absent » (Labridy, 1997). L’entraîneur, par l’intermédiaire de ce transfert va subir une sorte de sacralisation et devenir ainsi l’objet des fantasmes de l’athlète. Mais le processus n’est pas l’apanage de l’athlète et peut se constater chez l’entraîneur, dans une identification possible à son athlète car il peut être, comme dit Kaes (1973) « habité du rêve inconscient de réaliser dans l’autre et par l’autre ce qui lui a manqué ». C’est ce qu’illustre la citation de John Smith [(2)] (entraîneur d’Ato Bolton et Maurice Green) : « en tant qu’athlète, je n’ai pas gagné, mais je suis allé jusqu’aux finales. Alors j’ai dit à Bob Larsen, entraîneur en chef à l’UCLA, qui me proposait de l’assister : « donnes moi les athlètes qu’il me faut. Ceux qui peuvent faire ce que moi j’ai toujours voulu faire, mais qui sont meilleurs que ce que je n’ai jamais été (…) je vis viscéralement à travers ces athlètes ». On s’aperçoit alors que le désir de l’athlète vient prolonger celui de l’entraîneur, ce qui est l’inverse de la situation analytique : l’analyste ne désire rien pour l’analysant, car c’est à l’analysant de trouver le chemin du désir. Il y a donc la question du désir qui entre en jeu : désir d’entraîner, désir de s’entraîner, que l’amour peut recouvrir.

Le leurre de l’amour

En effet, Lacan (1973) insiste sur l’effet de l’amour présent dans le mécanisme du transfert : « La demande en soi porte sur autre chose que sur la satisfaction qu’elle appelle. Elle est demande d’une présence ou d’une absence (…) La demande annule la particularité de tout ce qui peut-être accordé en le transmuant en preuve d’amour ». En plus du transfert, il y aurait un effet de « leurre de l’amour » adressé au savoir de l’entraîneur et non à l’entraîneur lui-même. La personne, substitut d’une autre, va être investie comme un « sujet supposé savoir ». C’est ainsi qu’il se produit une idéalisation par l’athlète de l’entraîneur et des connaissances qui lui sont supposées (infaillibles) et qui l’amèneront à devenir champion.

Le transfert, au sens lacanien, est « une ombre d’amour », car il masque « la réalité pulsionnelle de l’inconscient », qui ne cherche qu’à se réaliser dans cette nouvelle rencontre. Le dispositif de la cure analytique permet de repérer ces enjeux : à travers la rencontre à l’analyste, il y a à la fois la mise en jeu de l’inactuel mais aussi le perpétuel de la pulsion, et son actualisation dans l’adresse vers l’analyste. Mais dans les relations ordinaires, la vie ne s’analyse pas, elle s’exerce dans une dialectique affective aux intensités variables, et il est parfois difficile de repérer ce qui se joue pour les partenaires : le désir d’entraîner peut éventuellement se confondre avec les sentiments portés aux personnes : « Être entraîneur, c’est osciller entre une position d’indispensable valorisé, déclenchant à ce titre l’amour et la haine et une position de laissé pour compte dans l’après coup du résultat ». (Labridy, 1985).

L’effet de « leurre de l’amour » adressé au savoir de l’entraîneur et non à l’entraîneur lui-même peut entraîner des confusions logiques entre la nécessité d’un appui transférentiel et un désordre des sentiments (compréhension, amitié, amour et sexualité). Ce leurre, explique peut-être ce qui amène les athlètes et les entraîneurs à avoir des relations amoureuses, qui confondent l’amour avec le semblant de l’amour ; à transférer dans la réalité, une relation fantasmatique imaginaire.

L’approche psychanalytique permet donc de repérer la nécessité d’une « conjonction de deux désirs vers un seul acte » sans qu’il y ait confusion de sentiments : elle permet d’éclairer l’entraîneur sur l’effet du transfert dans la relation, ainsi que la part pulsionnelle corporelle impliquée dans l’activité sportive.

L’implication de la structure parentale

La notion de transfert nous permet d’aborder une autre notion, qui est celle de l’implication de la structure familiale ; c’est à dire la relation aux autres (ceux que dans le champ analytique, nous appelons les autres primordiaux : père, mère, adultes ayant éduqué l’enfant, fratrie), dont on distinguera la relation à l’Autre (différenciations signifiantes conséquences du discours proféré par les parents et l’entourage significatif du sportif). Selon Lacan (1975), le sujet est porté par le désir des Autres : « Nous croyons que nous disons ce que nous voulons, mais c’est ce qu’ont voulu les autres, particulièrement notre famille qui nous parle ».

En effet, le choix d’un sport pour un athlète est déterminé par des liens conscients ou inconscients formulés par les autres (ses parents, sa famille), qui ont été incorporés. Nombreux sont les exemples, où les enfants étaient déjà des champions dans l’esprit de leurs parents, bien avant de naître : Patrice Martin, Martina Hingis qui a déclaré « Ma mère savait déjà que je serais une championne de tennis quand j’étais dans son ventre ».

Par ailleurs, le choix de devenir entraîneur peut également être questionné à partir des liens aux autres primordiaux. Le G.R.E.PAS (1998) avait observé lors d’une étude sur les entraîneurs experts, l’importance de la figure du père dans la destinée des entraîneurs. Les études de cas montrent que les entraîneurs assument leur expertise à partir du moment où il y a eu un dépassement du père dans leurs histoires respectives, ce qui leur permettrait alors de se confronter à de nouveaux conflits en assumant pleinement les responsabilités de leurs décisions (notamment concernant la sélection des athlètes).

Ainsi, chaque sportif a une structure familiale qui est le réseau de signifiants et de significations, marquant son corps de satisfactions diverses et qui lui compose une histoire particulière, dont il ne peut se déjouer. Cette histoire se crée à partir de ce que Freud (1961) a appelé le complexe d’Œdipe, qui voit dans l’orientation des premiers choix de l’enfant, une structuration pour les choix postérieurs. L’Œdipe, temps crucial pour l’enfant, constitue un élément déterminant et différencié selon le sexe. Le garçon, commence par éprouver une tendre affection pour sa mère et s’identifie en même temps à son père. Ensuite, il éprouve une rivalité phallique envers son père, qu’il voit en concurrent.

Le garçon sort de l’Œdipe en acceptant la castration et en renonçant à cette rivalité. Alors que la fille éprouve d’abord un attachement pour sa mère et s’identifie à elle, puis entre dans l’Œdipe en se confrontant à l’angoisse de castration. C’est à dire qu’elle investit son affection envers son père et éprouve une rivalité envers sa mère. C’est l’adolescence qui vient rappeler cette période oedipienne et permet à l’enfant de se détacher de sa position d’enfant-objet, protégé par la mère et d’adopter une position, qu’il a à construire, celle de sujet. Le choix ultérieur se construit en fonction de la position adoptée : « C’est en écho de cette phase de développement que la première passion amoureuse d’une jeune homme va vers une femme mûre et la fille vers un homme âgé, investi d’autorité, qui sont à même de faire vivre pour eux, l’image de la mère et du père »(Freud, 1942). Le complexe d’Œdipe joue un rôle structurant, car sa résolution est la condition indispensable pour l’accès à tous les systèmes symboliques de la société et la construction des relations aux autres.

Cette théorisation permet d’éclairer la relation avec un entraîneur, lui-même investi d’une certaine autorité : Quelle fonction va-t-il occuper dans la vie de son entraîné ?

But de l’étude et hypothèse

Le but de cette étude est donc d’analyser à partir de la perspective psychanalytique, la relation qu’entretient un athlète avec son entraîneur. On suppose alors que la relation entraîneur-entraîné est soutenue par un transfert qui prolonge la structuration familiale ; elle fait lien avec la structure familiale, tout en la dépassant puisque de cette relation est attendue une production inédite provoquant une structuration nouvelle. Chaque athlète dans une relation réagira avec un entraîneur en fonction des relations qu’il a entretenu avec ses parents. C’est à dire que la rencontre avec l’entraîneur suppose la poursuite de la dialectique oedipienne pour permettre au sujet de la dépasser.

L’entraîneur et son entraîné seraient donc confrontés par et dans leur rencontre, à un remaniement des processus inconscients à partir desquels ils ont respectivement construit leur histoire ; l’atteinte des performances désirées en serait la conséquence.

 

Matériel et méthodes

 

 

Dispositif de recherche

Nous avons choisi de nous appuyer sur une méthode qualitative de recueil des données. L’entretien clinique semblait adapté à notre problématique de recherche, car il concerne la question du sujet, dans le sens où il réside dans « la singularité et la totalité d’un sujet, prenant simultanément en compte son fonctionnement psychique, son mode relationnel, l’histoire vécue, les évènements extérieurs » (Bourguignon, 1986). Il s’agissait de saisir la particularité de chaque athlète à travers son histoire, par un repérage des signifiants importants et dans ses élaborations subjectives des relations aux autres, et particulièrement à l’entraîneur.

Cette démarche suppose que l’implication du chercheur soit prise en compte : tout d’abord parce que la demande est inversée par rapport à une démarche clinique thérapeutique, car la demande émanait de nous. L’absence de demande de la part du sportif, lui permettait de s’impliquer partiellement ; tout en lui donnant l’occasion d’exprimer son vécu, ses histoires personnelles, ses souffrances et de valoriser ses expériences sportives. L’écoute, du point de vue de la recherche est distincte de celle de la pratique clinique, car une certaine distance a été conservée. Cependant la situation de demande envers le sportif a permis à certains sportifs d’inclure leurs questions personnelles et intimes, prises dans ce processus de parole. Il est apparu, à un moment donné, l’impossibilité d’établir une bonne distance vis-à-vis de certains athlètes et la nécessité de s’adapter à la fois à notre recherche et à leurs interrogations.

Les entretiens ont donc été limités à trois pour chaque athlète afin que la relation de recherche ne provoque pas une demande d’intervention clinique.

La réflexion sur le nombre d’entretiens a pris en compte la nécessité que la personne interrogée et le chercheur élaborent la problématique personnelle jusqu’à un certain point ; ce qu’un unique entretien ne permettait pas.

Les entretiens, semi-directifs, ont suivi une stratégie d’intervention spécifique au cadre théorique de la psychanalyse reprenant l’élaboration de Lacan [(3)] : c’est à dire — la référence au moi Idéal (à l’imaginaire du sportif, de l’entraîneur idéal) ; — l’inscription dans les signifiants familiaux (le symbolique qui fait référence à la famille) ; — la référence au manque, au réel du corps (ce qui de la satisfaction échappe au sportif).

Les premiers entretiens se sont déroulés autour de thèmes précis, basés sur nos hypothèses, afin de dresser un portrait du sportif, de comprendre son insertion à l’intérieur de la famille, ses choix sportifs et l’implication dans les relations aux entraîneurs. Les deux entretiens suivants étaient plus axés sur des questions spécifiques qui ont surgi lors des premiers entretiens et qui émanaient du discours des athlètes.

Déroulement des entretiens

La période d’entretien s’est échelonnée de fin mars à début Juillet 2000. La prise de contact avec les athlètes s’est effectuée pendant les Championnats de France d’athlétisme de Liévin ; ceux-ci ont été choisis par rapport à leur niveau de performance. Chaque athlète a répondu à 3 entretiens, d’une durée minimum de 45 minutes, dans des lieux divers et fixés par lui selon sa disponibilité. Les entretiens ont été enregistrés avec l’accord des athlètes.

Transcription des entretiens et constructions des cas

Les entretiens ont été retranscrits dans leur intégralité. Dans un premier temps, ils ont donné lieu à un découpage selon plusieurs unités : le début de l’athlétisme, les signifiants familiaux et leur position subjective, la place de l’athlétisme et la confrontation au réel du corps et les relations aux entraîneurs. L’analyse des données a d’abord donné lieu à un récit de chaque athlète ; puis à une interprétation de cas en prenant en compte le lien entre les relations entraîneurs-entraînés et la structuration familiale. Par souci d’intérêt et par difficulté à réduire les récits sous forme d’article, nous avons décidé de présenter succinctement les éléments les plus importants issus de la construction des cas.

Présentation des sportifs

Cette étude a été réalisée avec 6 athlètes (3 garçons, 3 filles) ayant au minimum un niveau national dans leur discipline. La moyenne d’âge est de 25 ans pour les garçons et de 23 ans pour les filles. Le nom des athlètes a été modifié, selon leur accord, pour conserver leur anonymat. Pour les garçons : Thierry, 26 ans, est spécialiste du sprint à un niveau national ; Antoine, 23 ans, est spécialiste des haies à un niveau international ; Frédéric, 24 ans, est spécialiste du saut en longueur à un niveau international. Pour les filles : Laurence, 32 ans, ancienne internationale de lancer de poids ; Mathilde, 21 ans, spécialiste du javelot à un niveau national ; Nadia, 18 ans, spécialiste de cross à un niveau européen.

 

Résultats : Les récits des sportifs

 

 

Thierry s’est orienté vers l’athlétisme assez tardivement alors qu’il ne pouvait assouvir sa passion pour le football, à la suite d’un test raté : « J’ai dribblé 5 personnes et au bout d’une demi-heure j’étais fatigué (…) ça m’avait traumatisé un peu parce que je me suis dit « si j’ai des crises d’asthmes, je ne pourrais pas tenir un match de 90 minutes ». Le sprint apparaissait donc comme un effort bref et Thierry s’est aperçu qu’il « courait beaucoup plus vite que tout le monde » sans s’entraîner.

Au niveau de la structure familiale, Thierry a vécu une différence d’âge importante (5 ans) avec ses frères ; il a toujours ressenti le manque de n’avoir pas « grandi ensemble ». Il cherche à jouir d’une relation privilégiée avec sa mère, qu’il considère comme « la femme de sa vie » et dont la place n’est pas remise en cause « Ma mère, c’est tout pour moi (…) Je la garde pour moi (…). Ma mère, il n’y a personne pour la remplacer, aucune femme ». Thierry conserve donc un attachement très fort à sa mère en contraste avec la relation qu’il vit avec son père. Son père, perçu comme une figure d’autorité « borné, égoïste » s’est souvent opposé à son désir de faire de l’athlétisme et ne considère son fils que par rapport à ses compétences : « Mon père, tant que t’es pas aux JO, t’es rien du tout ».

Thierry a connu 4 entraîneurs dans sa carrière sportive. Le premier entraîneur est marquant car il lui a appris la course et parce qu’il l’a mis dans une position privilégiée : « Il avait ses athlètes préférés plus ou moins. Moi je rentrais dans le lot (…) On n’a pas pu finir ce qu’on avait commencé ». Thierry part en métropole pour retrouver un second entraîneur avec qui la relation était très affective, qu’il qualifie d’ailleurs « d’exceptionnel ». Cet entraîneur l’avait recueilli chez lui et dépassait totalement son rôle. Thierry part pour ses études dans une autre ville et rencontre son troisième entraîneur. Cet entraîneur est synonyme de conflit, car il l’a identifié à son père. Il se sentait mis à l’écart par rapport à de « jeunes athlètes » qui avaient plus d’importance aux yeux de l’entraîneur. La relation qui ne lui permet pas d’avoir une position privilégiée à l’entraîneur aboutit alors à un conflit. Cela rejoint le fait que Thierry voit dans un entraîneur idéal, « quelqu’un qu’on peut considérer comme sa famille à soi ». Il a quitté cet entraîneur et s’entraîne depuis avec D, avec qui il a lié une « certaine amitié ».

Antoine débute l’athlétisme à l’initiative d’un professeur d’EPS du collège, qui lui fait passer un test ; il se souvient avoir fini « dans les 3 premiers ». Ce professeur l’initie à l’athlétisme mais il ressent très tôt une frustration qu’une relation d’amitié ne puisse se développer entre eux : « c’était mon prof, je ne pouvais pas me permettre d’avoir des facilités, de dire « ben, voilà, je te serre la main », c’était quand même assez fort les relations qu’on avait ». Il remarque la présence de ce professeur, qu’il met en contraste avec l’absence du père. Il éprouve une souffrance du manque du père réel, mais pas du côté du père symbolique car la mère a expliqué très tôt les raisons de son absence « J’ai toujours été élevé par ma mère (…) J’ai pas connu mon père ». La mère tient une place centrale car elle a fait « le père et la mère » et a toujours cherché à le protéger.

Plusieurs entraîneurs vont se succéder car Antoine a changé de lieu de résidence plusieurs fois. Il garde cependant en souvenir une relation avec un entraîneur qui lui a donné goût à l’athlétisme à nouveau, après avoir failli arrêter à la suite d’un conflit avec un entraîneur.

Antoine relate beaucoup d’histoires avec des personnes plus âgés que lui et ayant tous une fonction d’autorité (professeurs, entraîneurs). Sa rencontre avec son dernier entraîneur, A, lui marque une relation avec un homme qui s’inscrit dans la durée. Il pense que son dernier entraîneur lui convient car il « peux échanger en dehors de l’athlé avec lui ». Ses entraîneurs ont eu un rôle crucial dans sa vie « Je pense que du fait que je n’ai jamais connu mon père, je crois que tous mes entraîneurs ont en partie dans ma vie remplacé mon père ».

Frederic débute l’athlétisme par la rencontre avec un entraîneur, qui restera son unique entraîneur. A, le détecte lors d’une Olympiade sportive de la ville et l’initie à l’athlétisme : « Il m’a envoyé une lettre chez Moi pour m’inviter dans son groupe (…) c’est lui qui m’a fait venir à l’athlé parce qu’il a vu que j’avais des qualités ».

De ses relations avec ses parents, Frédéric évoque une absence de communication avec ses parents et notamment son père. Il n’a jamais pu s’identifier à lui, dans la mesure où il ne connaissait rien de sa vie : « j’ai l’impression d’avoir grandi dans une famille qui n’était pas vraiment la mienne parce qu’en fait je ne la connais pas ».

Sa relation avec l’entraîneur apparaît comme comblant un manque affectif, car Frédéric « recherchait un entraîneur qui ait une vie, une vie à faire partager, qui ne resterait pas dans le sport ». A, remplissait donc tous les rôles et il est devenu un repère « père spirituel ». Il pensait avoir trouvé en A « ce qui lui manquait » dans sa famille ; notamment par rapport à l’investissement que A avait envers lui : « Il y a eu une bonne harmonie entre nous à tel point que je passais beaucoup de temps avec lui en dehors de l’entraînement ». L’identification a connu une faille lorsque son entraîneur ne l’a pas suivi dans ses choix de vie (arrêt des études). Au même moment, A s’est moins investi envers lui car il a rencontré une femme. Mais la relation va résister à cette secousse puisque Frédéric considère que A avait le droit de se tromper aussi, ce qui lui a permis de détacher ses attentes affectives et de comprendre « qu’il ne fallait plus que je compte sur les autres ».

Laurence a débuté le lancer de poids grâce à un professeur d’EPS au lycée. Un entraîneur la repère lors d’une compétition scolaire : « il m’a repéré à une compétition, il a vu que j’avais du potentiel et m’a invité à un stage ». Cet entraîneur restera l’unique entraîneur de sa carrière. Laurence occupe une place significative de « dernière » de la famille, avec un grand écart d’âge avec ses sœurs (plus de 15 ans). Elle évoque un rapport de possession à sa mère et une proximité pulsionnelle : elle est son « oreille » et son « bâton de vieillesse ». D’un autre côté, le rapport au père est physique où elle se rappelle des jeux qu’elle partageait avec lui « Mon père, à chaque fois qu’il rentrait, il s’occupait de moi » et une notion de liberté apprise : « Mes parents m’ont toujours laissé faire ce que je voulais ».

Elle admet que son entraîneur lui a servi de substitut à la mort de son père au moment où elle a perdu son repère. Pour elle, le sport a été le prétexte à une rencontre d’un entraîneur.

La relation avec son entraîneur reposait sur une confiance « c’était une confiance qui était remise à l’épreuve systématiquement puisqu’une confiance, c’est pas quelque chose qu’on donne comme ça », jusqu’à ce qu’il parte sans l’avertir : » Il n’a pas eu le courage de me dire qu’il partait (…) il a eu la lâcheté de fuir et c’est vrai que je l’ai pris comme un abandon ». Elle a vécu cette fuite comme un deuxième abandon et pense qu’elle est devenue adulte à partir de ce moment-là. Elle n’a plus recherché d’entraîneur par la suite car elle ne veut plus reconstruire une histoire et « s’entraîner avec quelqu’un avec qui on a une relation construite sur de la relationnelle, c’est difficile ». Elle considère maintenant qu’elle est devenue « entraîneur d’elle-même ».

Nadia a été placée dans un foyer depuis l’âge de dix ans. Elle débute l’athlétisme par l’intermédiaire d’un éducateur qui restera son seul entraîneur : « il y avait un cross ici, il a vu que j’avais du talent et après il m’a dit « tu veux que je te prenne en main ».

De sa structure familiale, Nadia rejette tout ce qui lui vient de ses parents « je les exclue complètement », et considère que sa mère et son père sont à mettre dans le « même panier ». Elle a arrêté d’avoir des contacts avec eux : « si tu ne t’entends pas avec tes parents, ça ne sert à rien de continuer à avoir des liens. On a qu’une vie et il faut sélectionner les personnes pour vivre bien. Père ou pas père ». Par ailleurs, la particularité de Nadia est qu’elle se positionne en « garçon manqué », garçon qu’elle aurait aimé être dans sa famille d’origine maghrébine où il y avait une difficulté à faire de l’athlétisme quand on est une fille.

Alors O, son entraîneur est venu prolonger la structure car il lui a appris à « vivre », et a permis de construire un nouveau rapport au père qui tienne vraiment « O, c’est comme mon père pour moi, mais à l’entraînement, ça ne doit pas être ça (…) Je le considère comme mon père, c’est pas le rôle qu’il veut jouer pour moi mais c’est un deuxième papa ». La rencontre avec O est ce que Lacan appelle une « histoire d’amour » car elle l’a transformé en bon objet « généreux et passionné » et qu’elle lui suppose un savoir unique « Il n’y a que lui qui peut savoir. Qui peut m’entraîner ». Mais cette relation exige de l’exclusivité et elle ne supporte aucune rivalité féminine « Il peut entraîner un autre garçon, mais pas une autre fille, parce que les nanas, je ne peux pas les saquer (…) O, c’est mon coach à moi ».

L’athlétisme est devenue une « raison de vivre » où O a pris une place prépondérante : « Franchement, si demain, je n’ai plus de plans d’entraînements, je n’ai plus O… ce sera un vide, je vivrai mais pourquoi je vivrai ? ».

Mathilde débute l’athlétisme en faisant la rencontre d’un entraîneur, qui la connaissait par l’intermédiaire d’un professeur d’EPS : « J’allais dans un gymnase pour faire du hand et j’ai croisé L, il m’a dit « tu viens faire un peu d’athlé ». L’entraînement se poursuit par une compétition scolaire où Mathilde réussit « à se qualifier pour les Championnats de France ».

Chez elle, la problématique du regard joue un rôle important. D’abord dans sa famille, où sa mère possessive se « voit à travers elle », à qui elle s’est identifiée. Comme sa mère, son choix s’est porté vers le hand-ball et puis la réussite en athlétisme lui a fait atteindre le sport de haut niveau, alors que sa mère avait été contrainte à arrêter le sport. Ce regard maternel est pesant car il y a une nécessité pour elle d’arriver à la hauteur des espérances de sa mère : « Elle se revoit en moi. elle se revoit tellement en moi qu’elle croit que c’est elle ». Elle avoue que sa mère est possessive et lui martèle souvent « t’es pour moi, t’es à moi ». Mathilde vit toujours dans le besoin de se faire « aimer » de ses parents et vit les échecs comme une culpabilité « je serais incapable de dire à ma mère : « je ne me sens pas bien, je ne suis pas en confiance ». Alors que les relations avec son père sont plus « indéfinissables » car elle se sent libre de tout lui dire : « Mon père, c’est tout ». Elle se rend compte que le regard des autres a une importance dans la poursuite de sa carrière :« je ne faisais pas du sport pour moi, c’était pour le regard des autres, pour les autres, pour qu’on soit fier de moi, surtout mes parents ».

Avec son entraîneur, seul entraîneur de sa carrière, le regard est présent parce qu’ils se comprennent « par un regard » mais qui l’obsède en même temps « Dès que tu es regardée, tu essayes de faire les choses le mieux possible ». Il y a en même temps un fort désir de possession et le besoin d’être aimée ou plutôt la crainte de ne pas être préférée par son entraîneur ; le fait d’être en concurrence avec une autre fille lui a fait vivre la crainte « qu’elle prenne sa place ». Cette relation à l’entraîneur vient en retour d’une relation à la mère où elle introduit le fait qu’il l’entraîne parce que « tout ce qu’il fait pour moi, c’est par passion et parce qu’il se voit en moi ». Alors Mathilde vit à travers les autres et n’imagine pas encore prendre son autonomie car elle a encore besoin de « repères » et de quelqu’un qui lui dise « c’est bien ou c’est pas bien ».

 

Discussion

 

 

Cette étude a permis d’identifier dans chaque histoire d’athlète, des particularités quant à leur relation avec leur entraîneur. Cependant, il semble que des structures de vie se rejoignent sous différents aspects. Il semble que l’entraîneur soit un prolongement de la famille à partir d’un manque ; c’est d’ailleurs ce manque qui permet à l’athlète de faire une rencontre avec un autre.

La rencontre à l’entraîneur

On peut tout d’abord noter l’importance que revêt la rencontre à un entraîneur dans la carrière des sportifs. Chacun d’eux a eu une rencontre déterminante pour l’engagement vers l’athlétisme, soit par un professeur d’EPS (Laurence, Antoine) soit par un entraîneur. Cette rencontre est parfois précoce (comme pour Frédéric, vers 7 ans) et peut se prolonger dans le temps. Cela confirme ce que disait Labridy (1989) que certains sujets se découvrent sportifs à l’appui d’une demande (celle d’un professeur d’EPS par exemple).

Il est important d’observer chez les athlètes qui ont eu un seul entraîneur dans leur carrière, que la rencontre débute sur le repérage de l’entraîneur : Par exemple, Frédéric qui a reçu une lettre de son entraîneur (« venu vers lui ») ; Laurence qui a été « repéré » par son entraîneur, qui a vu qu’elle avait du potentiel ; Nadia qui a été détecté par son éducateur dont il a pressenti le talent ; l’entraîneur de Mathilde qui a « cru en son potentiel ». L’observation de la présence d’un unique entraîneur, rejoint le point de vue de Ragni (1990) suggérant que les meilleures performances sont souvent corrélées avec la stabilité de la relation entraîneur-entraîné en athlétisme.

Cette rencontre repose sur le désir de l’entraîneur, d’entraîner un athlète et rejoint l’explication donnée par Lacan (1966), du désir : « Pour tout dire, nulle part n’apparaît plus clairement, que le désir de l’homme trouve son sens dans le désir de l’autre, non pas tant parce que l’autre détient les clefs de l’objet désiré que, parce que son premier objet est d’être reconnu par l’autre ». En effet, pour l’athlète, le désir de l’entraîneur, c’est d’abord être reconnu en tant qu’athlète, et également de pouvoir s’identifier à ce désir. Il marque en même temps, le désir des autres signifiants auquel le sportif s’identifie. Le champion est ainsi le reflet du désir de ses parents, qui le pousse à se conformer à une image héroïque qu’il cherche à obtenir pour lui, pour ses parents et son entraîneur. Tous les sportifs, quels que soient les rapports entretenus avec leurs parents, ont évoqué leur envie de « faire plaisir » à leur proche (parfois même seulement au père ou à la mère) qui traduit quelque chose de leur histoire subjective : comme par exemple, Mathilde, dont la mère vit une relation de procuration, qui parfois pense « qu’elle est sa fille » et qui a peur du regard de sa mère sur sa performance. Elle s’est fixée des objectifs qu’elle n’a pas réussi à atteindre ; elle a été déçue par le comportement de sa mère et a eu une difficulté à vivre l’échec, ressenti comme un effritement de son image narcissique.

L’entraîneur vient à la place de…

Ce désir de l’entraîneur est essentiel car il peut venir provoquer une structuration marquante du côté de l’athlète. L’entraîneur s’inscrit alors dans une suite de relations et vient à la place de « l’objet perdu ». Lacan distingue l’objet désiré, de l’objet cause du désir : il y a un écart entre ce qui peut être désiré (la performance) et ce qui en cause la recherche, qui est un manque, une perte. L’objet-cause fonctionne par rapport à une perte fondamentale, celle de la séparation radicale entre les êtres, et oriente toute la vie des sujets comme une quête de retrouvaille. L’entraîneur peut venir occuper ou représenter à un moment donné de l’existence du sportif, ce qui a manqué à se structurer dans les relations familiales. Cela se traduit pour Antoine, qui n’a jamais connu son père et pour qui ses entraîneurs sont venus en remplacement ; Frédéric qui a « trouvé en À ce qui lui manquait » dans sa famille ; Nadia pour qui la relation à son entraîneur est venue remplacer les signifiants familiaux perdus ; Laurence qui a vécu le départ de son entraîneur, comme un deuxième deuil ou encore Thierry qui entretenait un rapport privilégié avec sa mère et désirait conserver une position de privilège et « décalée » vis-à-vis de son entraîneur. Ainsi l’entraîneur vient restaurer l’image déchue d’un père, inconnu (Antoine), distant (Frédéric), perdu (Laurence), détesté (Nadia) ou d’une mère imparfaite (Mathilde), pour monter sur « un piédestal imaginaire », celui qui a la connaissance infaillible. Il faut donc repérer chez les athlètes, à quel manque, vient suppléer cette relation inédite avec un entraîneur. Là, où la rencontre fonctionne, c’est là où il y a possibilité de construction d’un rapport à l’être « manquant ». À partir du manque, il peut y avoir énonciation d’un désir. Certaines relations seraient voués à l’échec dès lors que l’entraîneur deviendrait objet du désir ; c’est à dire que l’entraîneur occulterait le désir de l’athlète pour le prendre à son compte. L’échec se traduirait alors par un désir qui s’absente chez l’entraîné au profit d’une volonté de l’entraîneur qui s’impose à cette place. C’est peut-être ce qu’illustre la trajectoire de Mathilde, prise entre les désirs de sa mère et de son entraîneur et qui cherche maintenant « sa propre envie ».

La particularité de la relation chez les filles

Il apparaît dans le discours des filles athlètes, une relation de « possession », par rapport à leur entraîneur ; c’est à dire qu’elles demandent une forme d’exclusivité auprès de l’entraîneur, qui n’apparaît pas dans le discours des garçons, même si la relation est affectivement très forte. Pour les filles, l’enjeu semble différent ; c’est à dire qu’il leur faut cette « éventualité » d’être l’exclusivité pour l’entraîneur, d’être « unique » auprès de lui et donc une éventualité d’être « aimée ». Ceci pourrait donc amener à considérer la différence garçon-fille dans l’entraînement. Le transfert au « sujet-supposé-savoir » (Lacan), fonction occupée par l’entraîneur, est à l’œuvre pour les deux sexes, mais il y aurait peut-être le « supposé-amour » qui pourrait fonctionner en plus chez les filles. Cette perspective est encore à étudier mais on peut déjà la rattacher aux interrogations sur la différenciation sexuelle et préciser, comme l’a supposé Freud (1933) [(4)], que « d’être aimée est pour la femme un besoin plus fort que d’aimer ».

 

Conclusion

 

 

Tout d’abord, il convient de préciser que la méthode clinique et le nombre d’athlètes interrogés ne nous permettent pas d’étendre notre discussion dans une perspective générale, mais permettent de dégager des structures dans la relation entraîneur-entraîné. L’étude montre que la difficulté de l’entraînement ne réside pas dans la transmission de techniques ou de connaissances mais plutôt dans une incertitude de la rencontre : il y a quelque chose au-delà du savoir même qui échappe à l’entraîneur comme à l’athlète.

Dans un premier temps, l’engagement dans un sport dépendrait de la relation qui s’instaure avec un autre, de la façon dont l’entraîneur réussira ou pas à partir de son désir, à laisser l’athlète dialectiser son rapport particulier au manque. Cela suppose que l’entraîneur construise sa fonction à partir de ce qu’il ignore de l’athlète et de ce qu’ils auront à découvrir dans la nouveauté de leur rencontre.

Cette recherche suppose également de s’intéresser à l’entraîneur et à sa formation. Celui-ci ne doit-il pas avoir également clarifié les raisons qui le poussent à entraîner de manière singulière, pour ne pas confondre l’appui pulsionnel nécessaire à la réussite sportive avec des sentiments amoureux cherchant à s’exercer dans la réalité.

La relation est donc le produit de deux trajectoires subjectives, qui se rencontrent à un moment donné de leur expérience personnelle et sportive.

 

BIBLIOGRAPHIE

 

·  BOURGUIGNON, O. (1999) La démarche clinique en sciences humaines In : C, Revault-d’Allonnes (Coord.) Paris, Dunod : 40.

·  BROUSSE, M.H. (1993) « Le sportif à la limite ». Revue Pas tant, Revue de la découverte Freudienne 33 : 5-12.

·  FREUD, S. (1942) Trois essais sur la théorie sexuelle. Paris, Gallimard, Folio Essais.

·  FREUD, S. (1981) Essais de psychanalyse. Paris, Edition Payot, Petite Bibliothèque.

·  FREUD, S. (1961) Introduction à la psychanalyse. Paris, Edition Payot.

·  G.R.E.P.A.S (1998) Le savoir des entraîneurs experts, perspective psychanalytique. Rapport pour le Ministère Jeunesse et Sport : 80-81.

·  KAES, R. (1973) Fantasme et formation. Paris, Edition Dunod, Inconscient et culture.

·  LABRIDY, F. (1985) À l’écoute de six entraîneurs. EPS 195 : 30-38.

·  LABRIDY, F. (1989) Le couple entraîneur-entraîné. Activité-passivité. Actes du colloque « Sport et psychanalyse ». Paris, Editions INSEP : 81-86.

·  LABRIDY, F. (1997) La performance. In MH. Brousse, F. Labridy, A. Terrisse, MJ. Sauret. Sport Psychanalyse et science, Paris, Edition PUF : 41-97.

·  LACAN, J. (1966) Écrits 1. Paris, Edition du Seuil, Collection Points.

·  LACAN, J. (1973) Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse. Paris, Seuil.

·  LACAN, J. (1975) De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité. Paris, Edition du Seuil.

·  LACAN, J. (1978) Le séminaire Livre 2 : le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse. Paris, Edition Seuil.

·  RAGNI, P. (1990) La relation entraîneur-entraîné en athlétisme. Une demande d’amour à transférer à la technique. Mémoire de DEA non publié. Université de Nancy I.

 

NOTES

 

[(1)]  Adresse institutionnelle : UFR STAPS Nancy. L.A.D.A.P.S (Laboratoire d’analyse diversifiée des activités physiques et sportives). 30 rue du Jardin Botanique. 54600 Villers lès Nancy.

[(2)]  John Smith, L’Equipe du 15/01/2000.

[(3)]  Pour Lacan, l’expérience du « vivant-parlant » s’énonce à partir de 3 registres qui se nouent : Le symbolique organise les rapports, c’est par l’intermédiaire du langage que se fait la différenciation entre les sujets. L’imaginaire, s’articule avec le réel et le symbolique, c’est la valeur attribuée aux images, notamment celles du corps (c’est le lieu du représentable, de l’image du semblable où s’originent tous les phénomènes de rivalité imaginaire). Le réel est ce qui ne peut être nommé, ni représenté, l’impossible à savoir, à penser, à faire, à dire.

[(4)]  S. Freud. (1933), « La féminité », dans Nouvelles conférences d’introduction à la psychanalyse, Paris : Gallimard, p. 161

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